La publicité en ligne, ou publicité digitale, explose : elle représente fin 2019, à l’échelle mondiale, des dépenses de plus de 200 milliards d’euros.
Or, ce nouveau marché est largement dominé par les deux géants du web : Facebook et Google qui se partagent plus de 60 % de parts de marché.
La publicité digitale constitue d’ailleurs leur principale source de revenus.
Outre que ce nouveau mode de publicité induit de nouvelles techniques (cookies, bannières, référencements payants, utilisation de l’intelligence artificielle, etc …), suscitant des interrogations juridiques, il apparaît nécessaire de s’interroger sur l’encadrement juridique adéquat.
La publicité digitale se divise en deux grandes catégories :
- Le display, c’est-à-dire l’affichage sur internet (et donc sur les réseaux sociaux) avec achat d’espaces et insertion de visuels sous différentes formes (bannières, pop up…).
- Le search qui est la publicité liée aux moteurs de recherche sachant qu’il existe le référencement naturel et le référencement payant.
Dans les deux cas, la publicité digitale se voit appliquer le droit de la concurrence (la Commission européenne, à propose de l’affaire Facebook WhatsApp, en 2014, a eu l’occasion de préciser que le fait de fournir un service gratuit n’empêche pas l’application du droit de la concurrence dès lors qu’il y a une activité économique).
La Commission européenne a également condamné Google, par une décision Google Search AdSense du 20/03/2019, à une amende de 1,49 milliard d’euros (1,29% de son chiffre d’affaires en 2018) pour abus de position dominante sur le marché de l’intermédiation publicitaire, constituée « en imposant un certain nombre de clauses restrictives dans les contrats avec des sites tiers qui ont empêché ses rivaux […] de placer leurs annonces de recherche sur ces sites Web. »
La loi Sapin, instaurant un principe de transparence des prix des espaces publicitaires, est applicable à la publicité digitale, tout particulièrement depuis un décret de 2017.
La publicité digitale se voit également appliquer le RGPD, à savoir le droit des données personnelles, puisque les cookies utilisés dans la publicité digitale collectent des données personnelles et donnent lieu à des traitements ultérieurs. Ceci implique en particulier le recueil du consentement de l’internaute.
La CNIL a publié, le 14 janvier 2020, de nouvelles recommandations sur l’usage des cookies. Elle demande ainsi, entre autres exigences, que le refus des cookies soit aussi facile d’utilisation pour l’internaute que l’acceptation des cookies.
A noter cependant que ces recommandations de la CNIL ont donné lieu à un recours actuellement pendant devant le Conseil d’Etat, formé par les plus grosses agences de publicité digitale.
De même, le droit commun de la consommation est applicable à la publicité digitale, notamment les règles concernant la publicité trompeuse, comme la fausse gratuité. Ainsi, le Tribunal de Grande Instance de Paris a sanctionné le fait par Google, de présenter comme gratuite une inscription sur un réseau social alors qu’il y avait en réalité une contrepartie consistant en la communication de données personnelles.
Ceci amène à la question du partage des valeurs dont profite les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) aux dépends des créateurs de valeurs de propriété intellectuelle.
Force est de reconnaître que les recettes publicitaires colossales engrangées par les GAFAM ne doivent leur existence qu’à des contenus que les GAFAM n’ont ni produits ni financés et qui peuvent en outre être protégés par un titre de propriété intellectuelle.
La directive européenne dite « droit d’auteur » d’avril 2019 a comme ambition de rétablir un équilibre nécessaire entre ces différents protagonistes en permettant une meilleure rétribution des créateurs.
Véronique PIGUET
Avocat associé
CARAVELLE AVOCATS